19 September 2010 0

LA SAINTE FAMILLE DE MANCHESTER

Ultime escale du pèlerin
Par delà les continents
Au bout d’une épopée
Le ramenant, en route vers les terres australes,
Aux rives escarpées de l’île d’Albion

Banal, dorénavant, le canal de Venise
Insignifiant, le géant de fer de Paris
C’est à Manchester que logent la sainte famille
Et ses onze enfants drapés de rouge
Où chaque pèlerin est transporté par sa propre prière
Et ils sont soixante-dix neuf milles
A converger vers le rectangle sacré
Quadrillé de vert-espoir
Au gré de la tondeuse magique
Mais en ce jour de grâce du deuxième millénaire
Aucune machine en vue
Car le monde reprend dimension humaine

Porté par une vague passionnelle retenue des décennies durant,
Le pèlerin parvient au lieu des lieux
D’ où les dieux projettent leur radieuse réflexion
Jusqu’aux extrémités d’un globe
Rendu, par leur grâce,
Aussi minuscule que celui qu’ils foulent au pied
Immense est la gratitude du pèlerin
D’avoir survécu les errances des épreuves passées
Pour parvenir enfin en terrain promis

Contre le ciel étonné d’avoir perdu son deuil habituel,
La trinité footballistique
Proclame la gloire passée et future
En une danse figée dans le bronze
Tombant à genoux, le pèlerin demande à la caméra
Une image d’ultime humilité
Et subjugué par une joie fulgurante
Qui l’entraine au sol, il dépose un baiser sur le pavé

Alors, les écharpes rouges s’élancent des mains des colporteurs
Dans une envolée retenue seulement par des livres sterling
Les sœurs de la protestation ont peine à retenir leurs larmes jaunes et vertes
Le monde est enfin uni dans un foyer rouge de ferveur
Man – c’est le nom de l’homme avant le ballon rond
Ches – pour l’anglais, l’abri du cœur lorsqu’il perd son t
Ter – un terme musical confirmant la trinité
Manchester !

Qu’importe les anges visiteurs
Aux ailes blanches, aux plumes noires
Venus contrer les arabesques dessinées rouge sur vert

Dans l’arène, un chant d’outre-science surgit des corps en transe
Lorsque les onze de la sainte famille
Se dégagent de l’utérus de la terre
Pour répandre sur les privilégiés d’un lundi historique
La poussière dorée jusque-là négociable
Entre le rêve et l’imagination
Des frustrés de la création.

Daniel Labonne
Londres. 19 Août 2010.